Encore une décision en matière de demande nouvelle, sujet quasiment inépuisable s'il en est.

En l'espèce, il s'agissait de demander la résolution de la vente d'un véhicule automobile acheté neuf.

Pour commencer, un petit rappel des faits.

Une personne achète une voiture sans permis, neuve, pour pas moins de 15 000 euros. Rapidement, le véhicule connaît des pannes à répétitions de sorte que l'heureux propriétaire devient le plus dépité des automobilistes : il conduit désormais une véritable épave, dont les éléments de carrosserie se décrochent, dans l'habitacle duquel il gèle... et qui a même connu un début d'incendie.

On comprend sans peine le désarroi de ce propriétaire pour le moins "déçu" de son achat.

Devant le tribunal, sur la base d'un rapport d'expertise très favorable, concluant à l'existence d'un vice caché, il est demandé... des dommages et intérêts à hauteur du prix de vente, le fondement juridique étant la responsabilité contractuelle.

Ce qui devait arriver arriva, et le tribunal écarte les demandes en remboursement du prix, tout en relevant l'existence de vices cachés (indéniables) et l'absence de demande en résolution.

Un appel s'imposait.

L'appelant, fort logiquement, a saisi la cour d'une demande en résolution de la vente, et en restitution du prix de vente.

Il n'a pas échappé au vendeur - dont le dossier sur le fond était évidemment mauvais - que cette demande en résolution n'avait pas été formée devant le premier juge. Elle était donc nouvelle au sens de l'article 564 du CPC.

Même si l'appelant a tenté de "maquiller" la demande en première instance, en soutenant qu'il s'agissait en fait d'une demande estimatoire, formulée maladroitement, il n'a pas été suivi par les juges d'appel.

En effet, s'il est possible de passer d'une action estimatoire en première instance, à une action rédhibitoire en appel (Civ. 2e 11 juillet 1974, bull. n° 231 – CA Nancy, 2e ch. civ., 14 déc. 1992 : JCP G 1993, IV, 2436), la demande en résolution est nouvelle dès lors qu'il était conclu à la responsabilité contractuelle devant le premier juge. la Cour d'appel d'appel a donc déclaré les demandes irrecevables (CA Rennes 2e 17 janvier 2014, n° 12-03427, réf. cabinet 100138) :

Considérant que M. X, qui n’avait formé devant le premier juge que des demandes de paiement, en se fondant exclusivement sur la responsabilité contractuelle, et sans invoquer la garantie des vices cachés, ainsi que le souligne le jugement déféré, conclut à l’infirmation du jugement et demande en cause d’appel la résolution de la vente, la restitution du prix et le paiement de dommages et intérêts, en se fondant sur les dispositions des articles 1641 et suivants du code civil ;
Considérant que ces demandes sont nouvelles en cause d’appel, et comme telles, irrecevables, en application de l’article 564 du code de procédure civile ;

Il est vrai que si ses demandes avaient été déclarées recevables, il existait un risque de cassation, avec retour devant le juge d'appel, ce qui signifie perte de temps et augmentation du coût.

Il ne reste plus qu'à l'automobiliste de tenter de revenir devant le tribunal pour obtenir qu'il soit (enfin) statué sur sa demande en résolution. Le jugement ayant été infirmé, et les demandes déclarées irrecevables en appel, aucune autorité de la chose jugée ne devrait pouvoir lui être opposée.

A suivre, en espérant pour l'automobiliste qu'il obtienne rapidement de pouvoir rouler autrement que dans une poubelle achetée 15 000 euros...

 

Auteur: 
Christophe LHERMITTE