⚖️« En statuant ainsi, en subordonnant l’absence d’application de l’article 908 du code de procédure civile, dans une procédure fixée selon les dispositions de l’article 905 du même code, à la condition que la fixation de l’affaire à bref délai intervienne dans le délai de trois mois à compter de la déclaration d’appel, la cour d’appel, qui a ajouté à la loi une condition qu’elle ne comporte pas, a violé les textes susvisés. » (Civ. 2e, 13 juin 2024, n° 22-13.648, P).
Dit comme cela, cette décision nous paraît de plein de bon sens👍🏼
👉Même s’il pouvait être conseillé de conclure dans le délai de trois mois, en bref délai de droit, il paraissait s’imposer que le délai de trois mois de l’article 908 ne pouvait s’appliquer en bref délai au motif que l’affaire n’avait pas fait l’objet d’un avis de fixation dans le délai de trois mois de l’appel.
👉Un avis de fixation en bref délai ne fait pas sortir le dossier de la procédure avec mise en état pour entrer dans un bref délai , la Cour de cassation ayant précisé que « la procédure à bref délai s’applique de plein droit, même en l’absence d’ordonnance de fixation en ce sens. » .
En conséquence, dès lors que l’affaire relève de droit du bref délai, ce qui sera par exemple le cas de l’appel d’une ordonnance de référé, le délai pour conclure sera immanquablement le délai d’un mois de l’article 905-2, ou de deux mois de l’article 906-2 pour les appels formés à compter du 1er septembre 2024, et non celui de l’article 908. C’est donc bien un délai d’un mois, ou de deux mois si l’appel est formé à compter du 1er septembre 2024, qu’il faudra retenir, même si la prudence incite à se fixer une date butoir correspondant au délai de l’article 908.
Donc, rien à dire ici…
… sauf que cette affaire n’est pas aussi simple🧐
Elle avait déjà donné lieu à un arrêt, non publié (2e Civ., 17 septembre 2020, pourvoi n° 19-18.884), commenté sur le blog.
Le point particulier de cette affaire est que ce n’est pas une procédure en bref délai de droit.
Cette orientation est intervenue tardivement, et bien après expiration du délai pour conclure.
Le problème est que l’intimé avait saisi le CME d’un incident de caducité pour non-respect du délai 908, alors que l’affaire avait été orientée en bref délai, dessaisissant le CME.
Lorsque l’affaire a été renvoyée en procédure avec mise en état, l’intimé a omis de saisir le conseiller de la mise en état par conclusions.
L’intimé était irrecevable en sa demande de caducité présentée à un CME dessaisi ; il n’aurait d’ailleurs probablement pas pu saisir le président… qui n’a pas le pouvoir de se prononcer sur un délai 908 qui n’est pas un délai 905-2🤷🏼♂️
👉C’est le premier arrêt de cassation, renvoyant devant la cour d’appel qui s’est prononcée sur la caducité.
Il ne peut être discuté que l’affaire ne relevait pas du bref délai de droit, et que l’orientation en bref délai n’est intervenue que plusieurs mois après, et après expiration d’un délai 908 non respecté par l’appelant.
Il ressort de cet arrêt que ce qui était reproché à l’intimé est de ne pas avoir régularisé de nouvelles conclusions pour saisir le CME, ce qui a été fait devant la cour d’appel de renvoi.
Le renvoi de cassation ne semblait qu’être une formalité🪦… si la Cour de cassation n’avait pas rendu cet arrêt 😳
👉Cette décision du 13 juin 2024, dans sa motivation, est très intéressante : s’il n’y a pas d’avis de fixation dans le délai de trois mois, l’appelant n’a pas à conclure dans le délai de trois mois de l’article 908 dès lors que l’affaire relève du bref délai.
Sur ce point, et c’est celui qu’il faut retenir, tout est bon👍🏼
Mais en grattant un peu plus loin, cet arrêt perturbe🤨
👉Il en résulte qu’une caducité peut disparaître dans une certaine mesure, ce qui est tout de même à l’inverse de ce qu’est une caducité.
Une caducité, c’est une sanction à un moment donné dès lors que la diligence attendue pour consolider l’acte n’est pas intervenue. Si l’appelant n’a pas remis ses conclusions au greffe dans le délai de trois mois de l’acte d’appel, cet acte est caduc, et il ne restera plus qu’à le constater.
La cause de cette caducité est l’absence de la diligence qui consolide l’acte.
👉Mais il apparaît qu’un appelant dont l’acte d’appel est caduc, peut s’en sortir en obtenant une orientation à bref délai, passé son délai pour conclure.
⚠️Une orientation en bref délai purge la caducité encourue.
Cela est tout de même assez incompréhensible.
Il paraît tout de même assez perturbant de se dire que la partie appelante qui encourt une caducité pourra échapper à cette sanction s’il est fait droit à une orientation à bref délai, et même si l’affaire est ensuite orientée en procédure avec mise en état.
Sur le plan procédural, rien ne semble justifier une telle position 🤨 Ou alors, il faut me l’expliquer car je ne vois pas trop 😵💫
👉En conséquence, il est préférable d’en rester à la lecture première de l’arrêt, sans trop s’en compliquer l’interprétation : pas de délai pour conclure tant qu’il n’y a pas d’avis de fixation en bref délai…
Décidément, il devient tout de même compliqué de pénétrer les voies de la Cour de cassation…🤷🏼♂️