Comme dans toutes les histoires en procédure d'appel, cela commence par une déclaration d'appel.
Mais c'est une histoire très courte que je vous rapporte, car elle s'achève là où elle a commencé...
... pour le plus grand plaisir du confrère qui m'a chargé de la postulation en appel.
Une partie avait décidé de faire appel d'un jugement.
Malheureusement, le confrère parisien a choisi un postulant qui manifestement avait séché les cours de procédure civile. C'est pas bien !
Mal lui en a pris.
Je souligne tout de suite qu'il n'y a aucun mépris de ma part à l'égard du confrère.
Mais le confrère postulant est sauf erreur un tout jeune confrère, qui a accepté, à tort, de postuler en appel alors qu'il en ignore les rouages. Sa déclaration d'appel était le modèle même de ce qu'il ne faut pas faire.
Ce qui lui est reproché n'est pas d'ignorer les règles de la procédure civile, mais de ne pas avoir été conscient de ses limites.
Et j'accepterais les mêmes reproches si j'allais devant le juge administratif et que je me plantais lamentablement... ce qui serait inévitable car je n'y connais rien.
Même si le confrère a tenté de mettre tout cela sur le dos d'un prétendu "beugue" informatique, son argumentation n'a pas convaincu.
Ce qu'il a fait qui lui vaut une irrecevabilité ?
Avoir omis le fait qu'un intervenant en première instance perd sa qualité de tiers pour précisément être partie.
Et une partie en première instance ne peut devenir tiers en appel.
Ce n'est pas du "Magendie". C'est de la procédure civile assez basique sur la notion de parties à l'instance.
C'est une évidence, mais le confrère appelant ne l'avait pas bien compris.
Il a eu beau essayé de se dépatouiller pour tenter de dire que c'est la faute au RPVA, cela a été en vain.
Et je passe, entre autres, sur l'argumentation sur la notion de grief alors que nous discutions d'irrecevabilité...
Comme l'ont retenu les juges sur déféré, "il appartenait (à l'appelant) de l'intimer conformément aux dispositions d l'article 547", étant attendue que "la déclaration d'appel, dont les mention impliquent que celui qui en est l'auteur les sélectionne expressément, indique en l'espèce, comme seule partie intimée, XXX" (Rennes 7éme ch. prud'homale, 14 février 2018, n° 17-07732).
Par définition, une erreur ne peut être volontaire. Si elle est volontaire, il ne s’agit plus d’une erreur, mais d’une méconnaissance.
Par conséquent, et dès lors que l’appelant opère un choix « volontaire » dans la rédaction de son acte pour dire si une partie est intimée ou intervenante, il ne peut y avoir erreur mais méconnaissance. CQFD.
Ce qui est sanctionné n’est pas une erreur contenue dans l’acte d’appel, mais une méconnaissance des règles de procédure civile qui se traduit par une irrecevabilité de l’appel.
Il n’y a pas lieu à « indulgence pour une erreur commise par l’appelant » (ce qui était demandé par l'appelant), étant au besoin souligné que la procédure d’appel, surtout en version Magendie 2, et la jurisprudence de la Cour de cassation en la matière, ne se caractérisent pas vraiment par une indulgence à l’égard des parties qui se loupent dans l’accomplissement des diligences procédurales auxquelles elles sont tenues. Au contraire, la procédure d’appel est sans filet, et les erreurs sont désormais irrattrapables.
C'en est donc terminé pour le client puisque l'appel est déclaré irrecevable à son égard.
Les incidents devant les chambres prud'homales se multiplient. J'ai sur mon bureau quelques dossiers dans lesquelles je dois soulever des irrecevabilités et des caducités.
Je constate que les magistrats devant les chambres prud'homales ne semblent pas agacés par ces incidents de procédure, bien au contraire. Nous pouvions le craindre.
Alors que pourtant, jusqu'alors, ils n'étaient pas confrontés à ces questions de procédure qui sont donc nouvelles pour eux, nous pouvons voir qu'ils rendent des décisions motivées et de qualité. J'ai toujours admiré la faculté des membres de cette profession à passer d'un contentieux à un autre, et à s'adapter avec une facilité assez déconcertante et dont je serais bien incapable (je n'aurai pas été un bon magistrat... si tant est que je sois même un bon avocat...).