Les avocats savent, et doivent savoir, qu'ils sont concernés par l'article L. 218-2 du Code de la consommation selon lequel "l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans" (Civ. 2e, 26 mars 2015, no 14-11.599 P: D. 2015. Actu. 812 ; Dalloz avocats 2015. 137, obs. Dargent; JCP 2015, no 393, obs. Lasserre Capdeville; ibid., no 649, note Caseau-Roche; CCC 2015, no 156, obs. Raymond; RJDA 2015, no 472; Gaz. Pal. 2015. 1571, note Mignot; Dr. et proc. 2015, Cah. dr. consom., no 7, p. 22, obs. Nicod).
Et oui ! le client est un consommateur - c'est aussi parce qu'il est un consommateur comme les autres que notre convention d'honoraire contient désormais un bordereau de rétractation... même si je serais curieux de savoir si les conventions des confrères contiennent effectivement une tel bordereau... - et l'avocat est un prestataire de service, qui vend de la prestation juridique.
Et deux ans, l'air de rien, c'est vite passé, de sorte que l'avocat doit être particulièrement vigilant pour éviter que ne lui soit opposée cette prescription biennale. Et il ne s'agit pas d'une présomption de paiement.
Mais quid si le client est une personne morale ?
Rien de très original, mais une décision qui fait un intéressant rappel (Civ. 2e, 8 décembre 2016, n° 16-12284, non publié au bulletin) :
Vu l'article L. 137-2 du code de la consommation, devenu l'article L. 218-2 de ce code, ensemble l'article 2224 du code civil ;
Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel, que la société par actions simplifiée Château de Pondres (la société) a eu recours en 2012 à la société d'avocats Avouépericchi (l'avocat) pour défendre ses intérêts dans un litige civil ; qu'à la suite d'un différend sur le paiement des honoraires, l'avocat a saisi le bâtonnier de son ordre d'une demande en fixation de ceux-ci ;
Attendu que, pour déclarer prescrite la demande en paiement de l'avocate, l'ordonnance énonce que l'article L. 137-2 du code de la consommation prévoit que l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans ; que doit être considéré comme consommateur, au sens de la loi du 17 mars 2014, toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale ; qu'en l'espèce, le client d'un avocat, personne physique, est un consommateur lorsqu'il lui confie la défense d'une affaire personnelle, à condition qu'il n'y ait aucun lien avec son activité professionnelle, ce qui est le cas en l'espèce ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations que la cliente de l'avocat, société commerciale, était une personne morale, ce dont il se déduisait qu'elle n'avait pas la qualité de consommateur, le premier président a violé les textes susvisés ;
Donc, pas de prescription biennale pour le client personne morale.
Pour rappel/info, il ne suffit d'adresser une lettre recommandée à son client pour interrompre la prescription (Civ. 2e, 10 déc. 2015, no 14-25.892 P: D. 2016. Actu. 19 ; D. avocats 2016. 97, note Deharo ; JCP E 2016, no 1047; CCC 2016, no 52, obs. Bernheim-Desvaux; RJDA 2016, no 244).