Le défenseur syndical, s’il est soumis aux mêmes obligations procédurales que l’avocat, a néanmoins un statut différent, tenant justement au fait que, n’étant pas avocat, il n’a pas accès au RPVA.
Le législateur a donc prévu autre chose, étant rappelé à cet égard qu’il a fallu attendre le décret de mai 2017 pour fixer les règles, alors que les appels sont soumis à la représentation obligatoire en matière prud’homale depuis le 1er août 2016.
C’est l’article 930-2 qui règle la question de la remise des actes de procédure. Et c’est sur ce point que la Cour de cassation se prononce (Cass. 2e civ., 8 déc. 2022, n° 21-16.487, Publié au bulletin) :
« Réponse de la Cour
5. Selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH, 24 avril 2003, Yvon c. France, n° 44962/98, § 31), le principe de l’égalité des armes est l’un des éléments de la notion plus large de procès équitable, au sens de l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Il exige un juste équilibre entre les parties, chacune d’elles devant se voir offrir une possibilité raisonnable de présenter sa cause dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son ou ses adversaires.
6. L’obligation impartie aux défenseurs syndicaux, en matière prud’homale, de remettre au greffe les actes de procédure, notamment les premières conclusions d’appelant, ou de les lui adresser par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, ne crée pas de rupture dans l’égalité des armes, dès lors qu’il n’en ressort aucun net désavantage au détriment des défenseurs syndicaux auxquels sont offerts, afin de pallier l’impossibilité de leur permettre de communiquer les actes de procédure par voie électronique dans des conditions conformes aux exigences posées par le code de procédure civile, des moyens adaptés de remise de ces actes dans les délais requis.
7. La cour d’appel, qui a exactement retenu que l’obligation pour les défenseurs syndicaux de remettre au greffe leurs actes de procédure ou de les lui adresser par lettre recommandée avec accusé de réception, excluant ainsi leur envoi par télécopie ou courriel, ne faisait que tirer les conséquences de l’impossibilité pour eux d’accéder au RPVA, en a à juste titre déduit que ces modalités de remise des actes de procédure, par leur simplicité et leur caractère peu onéreux, ne plaçait pas les défenseurs syndicaux dans une situation de net désavantage par rapport aux avocats. »
Alors, oui, l’article 930-2 édicte une obligation, à laquelle le défenseur syndical ne peut pas déroger, tout comme l’avocat ne peut pas déroger à son obligation de remettre ses actes de procédure au greffe par voie électronique.
Et si le défenseur syndical ne se soumet pas à cette obligation, il ne pourra avoir recours à l’article 6§1 de la Convention.
Sauf erreur, le débat ne semble pas avoir été mis sur le terrain de l’obligation à titre de preuve. Le DS aurait pu soutenir que l’obligation de la lettre recommandée avec demande d’avis de réception avait pour objectif de prouver l’envoi, non de le valider.
Mais il ressort de cet arrêt de cassation que cette obligation est bien édictée à titre de validité, comme nous pouvions l’imaginer (et il me semble bien l’avoir écrit dans un article pour la Semaine Sociale Lamy, ainsi que dans mon ouvrage sur la procédure d’appel).
Reste maintenant à dire ce qu’il en est de l’article 930-3, concernant non plus la remise au greffe mais l’échange entre l’avocat et le défenseur syndical.
Je suis d’avis que tout comme pour l’article 930-2, il est édicté à titre de validité, non à titre de preuve.
Le DS a donc l’obligation de notifier ses actes de procédure à l’avocat par LRAR ou signification. Et inversement, l’avocat a la même obligation à l’égard du DS.
La pratique, qui peut exister, consistant à une remise en mains propres, me paraît extrêmement discutable. Et nous ne pouvons que déconseiller aux confrères, consoeurs et aux défenseurs syndicaux de procéder de cette manière… sauf à vouloir alimenter la jurisprudence de la Cour de cassation sur cette question...