Une partie fait appel devant la Cour d'appel de Paris le 17 août 2015.

Puis, le 8 avril 2016, appel est formé devant la Cour d'appel de Montpellier.

Au passage, nous pouvons nous interroger comment la partie a pu faire appel, devant la Cour d'appel de Paris, d'un jugement prud'homal rendu par le Conseil de prud'hommes de Montpellier. Cela restera une énigme pour laquelle la Cour de cassation ne donne aucun indice.

Le 30 juin 2016, la Cour d'appel de Paris rend un arrêt d'irrecevabilité. Soulignons qu'il s'agissait d'une procédure orale, sans conseiller de la mise en état, de sorte que c'est la cour d'appel qui a tranché cette question de recevabilité.

Evidemment, il s'agissait pour l'appelant malheureux de sauver sa procédure pendante devant la cour de Montpellier.

Et pou cela, il se prévalait de l'article 2241 du Code civil qui, rappelons-le, dispose que "La demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion" et que "Il en est de même lorsqu'elle est portée devant une juridiction incompétente ou lorsque l'acte de saisine de la juridiction est annulé par l'effet d'un vice de procédure".

Dès lors que l'appelant avait saisi une juridiction incompétente, au sens de la première partie de l'alinéa 2, il devait profiter de l'effet interruptif.

La Cour de cassation n'accueille pas ce moyen, qui était loin d'être idiot, et fait une application de l'article 2241 du Code civil à l'image de sa précédente jurisprudence constante en la matière (Cass. 2e civ., 21 mars 2019, n° 17-10.663, Publié au bulletin) :

« Et attendu, d’autre part, que si, en application de l’article 2241 du code civil, une déclaration d’appel, serait-elle formée devant une cour d’appel incompétente, interrompt le délai d’appel, cette interruption est, en application de l’article 2243 du même code, non avenue lorsque l’appel est définitivement rejeté par un moyen de fond ou par une fin de non-recevoir ; qu’ayant constaté que l’appel avait été déclaré irrecevable, c’est sans encourir les griefs du moyen que la cour d’appel a retenu que l’interruption du délai d’appel était non avenue ; »

Comme cette incompétence se termine pas une irrecevabilité, qui est un fin de non-recevoir, l'interruption est non avenue.

Le premier appel a bien eu un effet interruptif, mais qui a été perdu avec l'arrêt d'irrecevabilité.

L'incompétence de la juridiction profitera à plein de l'effet interruptif si cette incompétence donne lieu à renvoi devant une autre juridiction, pas lorsque ce problème d'incompétence est, en définitive, un défaut de pouvoir juridictionnel.

Il en sera ainsi en matière de concurrence, avec l'article L. 442-6 du Code de commerce. La saisine d'une cour autre que celle de Paris aboutit à l'irrecevabilité de l'appel. La saisine tardive de la Cour d'appel de Paris aboutira, pour les mêmes raisons, à l'irrecevabilité d cet appel qui pourtant avait profité, pour un temps, de l'effet interruptif.

Rien à dire. C'est propre et sans bavure !

 

 

 

Auteur: 
Christophe LHERMITTE

Commentaires

Cher ami;

Je partage ton analyse sur cet arrêt qui rappel à qui veut l'entendre cette bonne vieille distinction, entre d'un côté les nullités de forme ou de fond qui peuvent affecter les actes de procédure et qui bénéficient désormais des dispositions profitables de l'article 2241 du code civil, et de l'autre côté les fins de non recevoir qui affectent moins l'instrumentum lui même qu'est la déclaration d'appel que le droit même de former appel qui pour être exercé régulièrement, doit l'être devant le juge compétent, celui de la Cour du ressort dans lequel se trouve la juridiction ayant rendu la décision.

"Vouloir prouver des choses qui sont claires d'elles-mêmes, c'est éclairer le jour avec une lampe"

Aristote (384 av. J.C - 322 av. J.C)

Bien à toi;

Farid

Merci à toi Aristote,

Bien à toi.

C.

Bonjour,

L'évocation est strictement encadrée, à l'article 568.

Mais il s'agit peut-être de l'effet dévolutif, par lequel le juge d'appel est saisi de l'entier litige.

De plus, l'appel étant encore une voie d'achèvement du procès, il est possible de tenir de l'évolution de la situation des parties pour former des demandes qui par définition n'avaient pas essuyé le premier degré de juridiction.

Voilà, en gros, le principe.

Mais votre avocat pourra vous apporter la réponse au regard de votre situation personnelle.

Cordialement,

CL

Bonjour
Je souhaite savoir s il est possible d évoquer devant la Cour d Appel une question qui n a pas été soulevée devant le JAF ou demander à la Cour d Appel la révision du dossier du JAF.