Sujet simple en apparence, la péremption est plus complexe qu’elle n’y paraît.
Cet arrêt n’est pas publié, car il n’ajoute rien à ce que nous savons, ou à tout le moins à ce que la Cour de cassation nous a déjà dit (Cass. 2e civ., 8 sept. 2022, n° 20-23.217) :
« Vu les articles 370, 373, 376 et 392 du code de procédure civile :
5. Il résulte de ces textes que, dans le cas où l’action est transmissible, le décès d’une partie n’interrompt l’instance et le délai de péremption qu’au profit de ses ayants droit, qui peuvent seuls s’en prévaloir, sauf indivisibilité, et qu’en cas d’interruption de l’instance, seule la reprise de celle-ci fait courir de nouveau le délai de péremption.
6. Pour constater que l’instance est périmée depuis le 13 avril 2019, l’arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que le décès de [U] [I] a été notifié aux avocats de Mme [S] et M. [G] [T] le 13 avril 2017, ce qui constituait un motif valable d’interruption de l’instance, mais qu’entre cette notification et la saisine du conseiller de la mise en état le 19 septembre 2019, M. [T] n’avait accompli aucun acte de procédure, ne faisant que répondre à des questions du magistrat sans manifester une quelconque impulsion personnelle et que les pourparlers dont il se prévalait ne s’étaient traduits par aucune démarche concrète de nature à faire progresser l’affaire.
7. En statuant ainsi, alors que, d’une part, le litige successoral étant indivisible, l’interruption de l’instance et du délai de péremption bénéficiait à toutes les parties, parmi lesquelles figurait M. [T] en qualité d’ayant droit de Mme [I], et que, d’autre part, l’absence de reprise de l’instance n’avait pas fait courir le délai de péremption, la cour d’appel a violé les textes susvisés. »
Tout d’abord, est rappelé cet effet relatif de l’interruption de l’instance en cas de décès.
Le principe est que cette interruption ne profite pas à toutes les parties au litige, ce qui est très largement oublié, tant par les avocats que par les juges.
Et cela est logique : pour quelle raison une partie qui peut agir, et est informée de l’existence d’une instance, profiterait d’une interruption ?
Ce principe est rappelé.
Mais il connaît un tempérament, comme en l’espèce.
Si le litige est indivisible, cette interruption concerne toutes les parties.
Mais des litiges indivisibles, ce ne sont pas nécessairement les plus répandus.
Ici, le litige est successoral.
Et là, évidemment, la nature indivisible du litige ne fait pas débat.
L’interruption de l’instance profitait donc à toutes les parties, de sorte que le délai de péremption ne pouvait être opposé.
Il en ira différemment dans un litige bancaire par exemple. Si la banque poursuit un caution, et que l’une des cautions décès, et si ce décès est effectivement dénoncé, l’interruption de l’instance ne saurait profiter à l’établissement bancaire qui doit nécessairement faire diligence, sans s’estimer perchée, quand bien même une « ordonance d’interruption de l’instance » était rendue.
Ce type d’ordonnance, qui s’est généralisée ces dernières années, est faussement rassurante, et ne créé aucun droit, ne faisant que constater un état existant. Mais elle ne sert à rien, cette ordonnance, qui relève de l’administration judiciaire.